D’un forum à l’autre

Quelle thématique pour le prochain Forum de Bamako ? Ou comment penser le développement un demi-siècle après les promesses des indépendances.

 
Le Forum de Bamako a clôt ses travaux et son « blog » touche à sa fin. Nous avons voulu à RFI, autour de cet événement mobilisateur, ouvrir quelques pistes de réflexion sur la gouvernance, en prenant notamment des exemples au Mali. L’enjeu reste posé : comment penser autrement les questions de développement, spécialement à l’heure où la crise internationale remet en cause un certain nombre de certitudes, et plus que jamais enjoint à l’Afrique de trouver sa propre voie, en mettant à profit toutes les ressources, notamment intellectuelles, qu’elle recèle ?
 
Le prochain Forum de Bamako se tient à une période où il sera beaucoup fait appel à la mémoire : 2010 sera le moment de faire un « point » sur 50 ans d’indépendances africaines ; et sur 50 ans de stratégies fort diverses pour le développement de l’Afrique. Occasion aussi sera donnée de rappeler que les « pères » des indépendances, et avec eux les élites de l’époque, se sentaient investis d’une mission, et montraient une confiance dans l’avenir que les heurs et malheurs des décennies suivantes ont beaucoup ébranlée. Aussi aura-t-on avantage à examiner le rôle des élites africaines d’aujourd’hui, et à tenter de percevoir quel peut être leur apport dans la période actuelle : c’est d’ailleurs une des propositions de thèmes avancées pour le futur Forum de Bamako par des membres de son réseau.
 
La question de la mémoire n’est peut-être pas, en apparence, des plus prospectives (**). Elle est pourtant centrale. Il suffit de rappeler comment un pays tel que le Mali, berceau des grands empires d’Afrique de l’ouest,   doit sa singularité à une forte identité historique,  qui lui permet sans doute de garder une assise sociale au milieu des vicissitudes du temps présent. Or, c’est un historien malien, Doulaye Konaté*, président de l’association panafricaine des historiens, de passage à Paris pour participer à des séminaires à l’Ecole des hautes études en sciences sociales, qui nous confiait son inquiétude : le champ de la mémoire est menacé en Afrique, à une période où les historiens – réfugiés dans leurs recherches et leurs cercles spécialisés - ne sont plus audibles. Ce silence renvoie à une autre préoccupation : la jeune génération des historiens n’a pas encore fait ses preuves, et le relais est loin d’être assuré. Une situation qui répond à la mauvaise santé de l’université en Afrique. Former, éduquer : autre enjeu – un des plus redoutables – de gouvernance, sur lequel le Forum de Bamako s’est déjà penché.
 
T.P.
 
(*) Doulaye Konaté (Université de Bamako), est ancien président de l’Association des Historiens Africains et auteur de Travail de mémoire et construction nationale au Mali (Paris, Editions L’Harmattan).
 
(**) Faire de l’histoire pour affronter les défis du futur … ce n’est pas à RFI qu’on dira le contraire. La radio publique française prépare d’ici la fin 2009 une série exceptionnelle d’enregistrements, basés sur les archives radiophoniques, qui retracent un demi-siècle d’histoire culturelle de l’Afrique. Produites par Elikia Mbokolo et Philippe Sainteny, ces réalisations entendent rappeler l’importance de la création culturelle en Afrique, et le rôle crucial que les intellectuels et artistes jouent dans l’évolution du continent. Premier coffret de 3 CD, livré dernièrement au Salon du livre de Paris : L’Afrique littéraire.